Editor

« Oh là là, c’est un chef-d’œuvre ! », dit le petit Jacquot (de Nantes), alias Jacques Demy, âgé de quatorze ans lorsqu’il découvre Les Enfants du Paradis à sa sortie en 1945. La scène est tirée de Jacquot de Nantes, le film qu’Agnès Varda consacre à Jacques Demy en 1991. Celui-ci n’est pas le seul à avoir été bouleversé par la vision du film de Marcel Carné, ni à être ému par le scénario et les dialogues de Jacques Prévert, ou par le jeu des acteurs du film (Arletty, Barrault, Brasseur). Les Enfants du Paradis ont profondément marqué le public en France, puis dans le monde entier. Marcel Carné, Jacques Prévert, Jacques Demy… Il y a là une filiation poétique fondée sur l’émerveillement, le rêve ou l’enchantement.

Pure coïncidence, nos deux expositions de la Saison 2012-2013 seront consacrées, l’une aux Enfants du Paradis, l’autre à Jacques Demy.

Pourquoi Les Enfants du Paradis ? La Cinémathèque française et la Fondation Jérôme Seydoux – Pathé possèdent dans leurs collections respectives de magnifiques archives illustrant la production, la réalisation et la sortie de ce film conçu et réalisé dans le contexte très particulier de l’Occupation. Affiches, dessins, photos, costumes, appareils, vues stéréoscopiques, scénarios, correspondances, maquettes, éléments de décors, matériels publicitaires : en unissant leurs efforts la Fondation Jérôme Seydoux – Pathé et La Cinémathèque proposeront aux visiteurs une exposition riche de plus de 300 pièces très originales, consacrée à ce film parmi les plus mythiques de toute l’histoire du cinéma français.

La seconde exposition sera consacrée à Jacques Demy dont l’imaginaire artistique dessine un vaste monde traversé de chassés-croisés amoureux. Villes portuaires - Nantes, Nice, Cherbourg, Rochefort, Marseille -, où les personnages sont en attente d’un départ vers leur rêve ou leur destin. Jacques Demy (1931-1990) fut un véritable magicien, un conteur puisant dans son enfance une incroyable énergie créatrice, pour inventer un monde peuplé de matelots, de forains, de jumelles excentriques, de danseuses, d’ouvriers, de fées et de princes.

Conçue en partenariat avec Ciné-Tamaris (Rosalie Varda et Mathieu Demy), l’exposition dévoilera au public photographies, dessins et peintures de Jacques Demy, carnets et scénarios inédits provenant de son cabinet intime, ainsi que des œuvres réalisées par des artistes qu’il admirait - Cocteau, Hockney, Dufy, Calder, etc.

La Cinémathèque française crée un nouveau rendez-vous annuel à Paris : « Toute la mémoire du monde. Festival international du film restauré », du 28 novembre au 2 décembre. L’indispensable travail des archives, des détenteurs de catalogues et des distributeurs pour sauver des films, les restaurer et les rendre à nouveau visibles dans leur forme originelle sera ainsi mis à l’honneur.

Les programmations de La Cinémathèque seront particulièrement riches, tout au long de la Saison 2012-2013. Outre des hommages à Marcel Carné, à Jacques et Pierre Prévert ainsi qu’à Jacques Demy, parallèlement à nos deux expositions, le public aura le plaisir de découvrir ou de redécouvrir les œuvres de Otto Preminger, Manoel de Oliveira, Jean-Louis Trintignant, Maurice Pialat, Robert Guédiguian, Shinji Somai, Ethan et Joel Coen, Alexander Kluge, Bernardo Bertolucci, René Clément, Jean-Claude Biette, Naomi Kawase ou encore Tay Garnett et Pierre Perrault. La Cinémathèque fêtera le centenaire du Studio Universal, à travers une programmation fournie : 100 ans/100 films, et les 50 ans des Films du Losange. Le cinéma se conjuguera à tous les temps, pour satisfaire la curiosité d’un public de plus en plus large.

Serge Toubiana
Directeur général