A l'occasion du Midem 2004, l'Adami (Société pour l'Administration des droits des artistes et musiciens interprètes), favorable à la création d'une licence légale perçue auprès des fournisseurs d'accès à Internet afin de rémunérer l'ensemble des ayants droit, explique et développe sa position sur le peer-to-peer.
LA LICENCE LÉGALE : UNE RÉPONSE ADAPTÉE AU PEER-TO-PEER
Le peer-to-peer , système d’échange direct de fichiers entre internautes, popularisé par Napster, puis par Kazaa,
connaît un développement sans précédent depuis deux ans. L’Adami, comme tous les ayants droit, s’inquiète de
voir des millions de fichiers s’échanger sur Internet sans que les artistes qu’elle représente ne perçoivent la
moindre rémunération. Consciente du fait qu’il est probablement impossible de mettre fin à ce phénomène,
l’Adami souhaite que le législateur décide la création d’une licence légale*, redevance qui serait perçue auprès des
fournisseurs d’accès à Internet, afin de rémunérer l’ensemble des ayants droit.
Le peer-to-peerest-il réservé aux échanges de fichiers
musicaux entre particuliers ?
Non. Aux côtés de la musique, le cinéma, mais aussi les séries TV, la photographie,
les livres, les jeux vidéos et les logiciels sont de plus en plus échangés
alors que ces œuvres sont protégées. D’autre part, le peer-to-peer est une
technologie, en plein développement, d’échange de toutes sortes de fichiers qui
concerne également les entreprises, la recherche scientifique et le commerce
en ligne. Le travail collaboratif entre plusieurs filiales d’une même entreprise,
le développement des logiciels libres ( open source), les places des marchés
financiers, les forums de discussion reposent de plus en plus sur une technologie
de type peer-to-peer. Il en va de même pour l’informatique répartie ( grid
computing), qui permet de mettre en commun, sur le réseau, la puissance de
calcul de l’ensemble des machines connectées.
Peut-on interdire le peer-to-peer?
Très difficilement, d’autant que les éditeurs de ces logiciels ne semblent pas
attaquables. Les récentes décisions de justice à propos de Kazaa le confirment.
Rappelons que les principaux réseaux de peer-to-peertels FastTrack (Kazaa)
ou Gnutella ne reposent pas sur l’utilisation d’un site central. Cependant, ces
décisions de justice sont encore contestées, y compris par des organisations
internationales telles que la Cisac, l’IFPI, la FIAPF ou l’IVF. Par contre, la mise
à la disposition du public, sans autorisation, de fichiers protégés, est en
elle-même clairement interdite. Pourtant, nous pensons que l’échange entre
particuliers est d’ores et déjà un nouveau modèle économique. Trouvons
les solutions pour rémunérer les ayants droit plutôt que de diaboliser le
peer-to-peer.
Peut-on empêcher les échanges sur les réseaux
peer-to-peer?
Non. Il n’y a pas actuellement de solution satisfaisante filtrer ou bloquer le
transfert des fichiers. Les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ne semblent
pas non plus disposés à exercer un tel contrôle qui doit relever, selon eux, de la
justice.
La plupart des méthodes employées actuellement pour entraver ces échanges
sont inadaptées :
• Poursuivre les internautes ayant mis à disposition ou transmis des fichiers
protégés : il est très difficile de les identifier et des erreurs peuvent être
commises, comme cela a été le cas aux USA de la part de l’organisation qui y
représente les producteurs phonographiques (RIAA). Les artistes vivent et
travaillent pour le plaisir et la satisfaction de leur public. Il n’est pas évident
de les mobiliser pour agir en justice contre le public qui le plus souvent veut
seulement accéder à leurs œuvres. C’est selon nous un choix très difficile à
faire.
• Inonder le réseau de fichiers-leurres inaudibles afin de décourager les
candidats au téléchargement : ces fichiers sont vite repérés.
• Equiper les CD de techniques anti-copie censées empêcher la lecture et
le transfert de morceaux de musique ou de films sur les disques durs
d’ordinateurs : le seul effet concret de ces mesures est de perturber la libre
jouissance du produit par le consommateur honnête car elles sont aisément
contournées par les autres.
• Multiplier les DRM* pour contrôler l’utilisation des fichiers téléchargés
(notamment sur les sites légaux de vente en ligne) : ils entravent fortement la
libre disposition du produit pour le consommateur et n’apportent pas une
réponse globale, d’autant qu’ils ne sont pas interopérables sur les différents
matériels achetés par le public. D’autre part, ce n’est pas sans arguments que
le magazine grand public SVM ( Science et Vie Micro) intitulait son numéro de
janvier 2004 consacré à la Musique : " Microsoft verrouille votre PC ". On peut
en effet craindre que l’avance technologique de Microsoft dans le domaine
des DRM n’aboutisse à une certaine emprise internationale dans le domaine
de la culture et ne restreigne de manière drastique des habitudes légitimes
d’accès aux œuvres.