Festival international de films de Fribourg – 20e édition / 12 – 19 mars 2006
Le Festival international de films de Fribourg fête sa 20e édition tourné vers le futur. Innovant, voire parfois carrément culotté, le cinéma numérique déferle cette année et s’emploie gaiement à faire éclater les codes formels. Ainsi le film fleuve avoisinant les huit heures «Heremias» réalisé par le philippin Lav Diaz sera présenté en compétition.
Les Compétitions
Sélection officielle: compétition
Dix longs métrages concourent pour le Regard d’Or (Grand Prix du Festival, offert par le Canton et la Ville de Fribourg), le Prix Spécial du Jury offert par SSA et Suissimage ainsi que le Prix Oikocrédit, décerné pour la première fois cette année à un producteur ou une productrice grâce auquel un réalisateur ou réalisatrice aura pu terminer sa première ou deuxième œuvre.
Dix longs métrages (dont une première internationale et deux premières mondiales), pour autant d’interrogations esthétiques sur le monde d’aujourd’hui.
Ainsi de Jocelyne Saab qui, avec «Dunia», relate lumineusement le conflit d’une femme égyptienne tiraillée entre désir d’émancipation et carcans traditionnels, Liang Ying qui dans sa fable universelle «Bei Ya Zi De Nan Hai» («Ramener le père à la maison») dépasse les clivages entre ville et campagne chinoise, Eric Khoo, qui, au travers trois histoires gravitant autour de l’impeccable portrait de Theresa Chan, femme sourde et aveugle, s’interroge sur la difficulté de communiquer («Be with me»), ou encore le Guinéen Gahité Fofana qui, à partir d’un fait divers, interpelle les politiques européennes dans «Un Matin bonne heure».
A leurs côtés, d’autres revendications en provenance du Brésil («As Tentações do Irmão Sebastião», José Araújo), d’Iran («Be Ahestegi»/«Tout doucement», Maziar Miri), de Corée du Sud («Bidan-gudu Saga-jigo Oshinda-the-ni»/«Tu disais que tu reviendrais avec des chaussures de soie», Kyun-dong Yeo. «Joeun Baewoo»/«Un grand Acteur», Yeon-hick Shin), des Philippines («Heremias», Lav Diaz), et de Taiwan («Shen Hai»/«Blue Cha Cha», Wen-tang Cheng).
Les autres prix: Prix du public (offert par la DDC), le Prix du Jury œcuménique (offert par Action de Carême et Pain pour le Prochain), le Prix FIPRESCI (Fédération internationale de la presse cinématographique), le Prix E-CHANGER du jury des Jeunes, et le Prix Don Quijote de la Fédération internationale des ciné-clubs (FICC).
Le Jury international est composé de Meret Matter (metteuse en scène et actrice, Suisse), Paloma Rocha (productrice et réalisatrice, Brésil), Michel Demopoulos (critique et ancien directeur du Festival de Thessalonique, Grèce) de Jochen D. Girsch (distributeur, Allemagne), de Jose Lacaba (scénariste et critique, Philippines).
Sélection officielle: compétition documentaire
Privilégiant une approche personnelle et engagée, que ce soit à travers le choix des sujets ou l’implication du réalisateur en tant que personne, la compétition documentaire présente neuf films (dont deux premières mondiales et trois premières européennes), qui au-delà de l’analyse socio-économico-politique, n’oublie pas la poésie de l’être humain.
En suivant son père sur les chantiers, Kim-Mi-re dénonce avec «Nogada» l’esclavage insidieux et moderne qui frappe la Corée du Sud et son voisin le Japon. Pendant quinze ans, Yoshihiko Sumikawa a, dans «Taimagura Baachan», immortalisé un petit bout de femme, qui bien loin de la frénésie de Tokyo, vit les saisons. Dans «Doust», Sara Rastegar, à la recherche de ses origines iraniennes, confronte avec tendresse un berger chanteur à sa caméra. A travers le prisme du Cadi local, Christian Lelong saisit l’humanité découlant de la «Justice [coutumière] à Agadez». Avec «Dear Father, Quiet, we’re shooting…» David Benchetrit lance vigoureusement une pierre aux politiques d’occupations et d’oppressions israéliennes, laissant la parole aux objecteurs de conscience.
Sans oublier les regards tout aussi indispensables de Joel Pizzini (Brésil), Kamal Bahar (Iran), Miguel Kohan (Argentine), et Li Xiaofeng (Chine.)
Le Jury documentaire est composé de Bettina Hoffmann, (réalisatrice), de Roger de Diesbach, (journaliste) et de Patrick Ferla, (journaliste). Il attribuera le Prix du meilleur documentaire, doté cette année d’un montant de 10'000.- et offert conjointement par le quotidien La Liberté, la Télévision Suisse Romande et la Radio Suisse Romande.
Ouverture/Clôture:
Le Festival international de films de Fribourg ouvre sa 20e édition avec «Ji Feng Zhong De Ma» («Season of the Horse») première œuvre de l’acteur chinois Ning Cai, et cri d’alarme lancé au cœur des vastes étendues mongoles afin de préserver les traditions ancestrales.
En attendant l’Ancienne Gare, futur centre culturel qui sera le son nouveau lieu dès 2007, le Festival se clôturera le 19 mars sur un ballet de locomotives «Tokkyu Sanbyaku Mairu» («300 Miles en train express») réalisé en 1928 Saegusa Genjiro, et qui sera accompagné en live par Günter Buchwald et la Silent Movie Music Company.
Les Panoramas:
Le cinéma iranien s’en va –t-en guerre
Méconnu hors des frontières de l’Iran, souvent méprisé esthétiquement et accusé de propagande à l’intérieur du pays, le cinéma mettant en scène le conflit entre l’Iran et l’Irak (1980-1988) place les réalisateurs iraniens face à un nouvel défi fictionnel. Et la représentation de la guerre pose des questions de mise en scène tout autant que de politique. Inspirés dans un premier temps des productions occidentales, et notamment des westerns, ils forgent progressivement un genre autonome et original, avec ses personnages et son mode narratif.
Le cinéma numérique philippin de Revolution à Ebolusyon
Après des années de torpeur – qui a vu sa production cinématographique chuter de 300 à seulement 70 films par an- le cinéma philippin se réveille grâce aux nouvelles technologies. Une jeune génération de réalisateurs – Lav Diaz, Dante Mendoza, Aureus Solito, Rico Ilarde ou encore Khvan de la Cruz- fortement influencée par le cinéaste Lino Brocka, utilise cette nouvelle liberté pour offrir une vision peu orthodoxe et critique de la société philippine et s’essaye à tous les genres avec un aplomb stimulant.
La femme du bandit: Hommage à Helena Ignez
En première mondiale, le public fribourgeois est convié à embrasser en vingt-cinq films l’intense carrière de l’actrice brésilienne Helena Ignez. Artiste en avance sur son temps, Helena Ignez se prête comme fil rouge pour approfondir le parcours des mouvements d’avant-garde au Brésil, qui tout au long du XXe siècle, ont élaboré les conditions de leur autonomie à travers différentes phases.
A partir des films du début des années 60 («O Pátio», «A Grande Feira», «O Assalto ao Trem Pagador», «O Padre e a Moça»), en posant l’accent sur sa collaboration avec Rogério Sganzerla - le visionnaire auteur de O Bandido da Luz Vermelha ainsi qu’avec Julio Bressane («Copacabana mon amour», «A Mulher de Todos»), jusqu’aux œuvres récentes de jeune réalisateurs qu’elle continue d’inspirer, la créativité des films de la rétrospective alternent la gravité et l’irrévérence géniale.
L’Expo
En parallèle à l’hommage cinématographique que le FIFF lui consacre, Helena Ignez ouvre pour le public fribourgeois ses albums photos afin de partager les moments plus significatifs de sa vie privée et sa carrière professionnelle. A découvrir au Kaléidoscope des EEF, du 11 au 19 mars 2006, de 12h00 à 17h00. Vernissage samedi 11 mars à 16h00 en présence d’Helena Ignez.
Le Festival de Fribourg propose tout au long de la semaine une série de forums animés par des personnalités participant au festival. La «génération numérique» philippine en passant par le recours au cinéma de genre en Iran seront décryptés, tout autant que l’implication de l’acteur et la confrontation des jeunesses «globalisées» d’ici et d’ailleurs. L’occasion est offerte à tous de venir échanger opinions et points de vue au Kaléidoscope des EEF. De plus, lorsque le réalisateur est présent, des rencontres sont prévues après les séances avec le public.
Séances scolaires
La Planète éducative s’adresse aux écoles, depuis l’enseignement primaire jusqu’au niveau universitaire. Elle offre une sélection de films et un accompagnement sur mesure: présentation des films, rencontres avec des réalisateurs, lecture des sous-titres pour les tous jeunes spectateurs, fiches pédagogiques. En 2005, 6'327 personnes ont participé aux 28 projections de la Planète éducative, soit près du quart de la fréquentation totale du Festival.
La sélection 2006 compte onze films: «Bazi» («Le Jeu»), «Mari Iyagi», «Ji Feng Zhong De Ma» («Season of the Horse»), «Ouaga Saga», «Bab’Aziz – Le prince qui contemplait son âme», «A Máquina» («La Machine»), «La Demolición», «Quanto vale ou e por quilo?» (Qu’est-ce que ça vaut?»), «Palabras Verdaderas» («Mots vrais»), «Faz-Iran 1384» («Phase, Iran 2005»), «Justice à Agadez».
Hommage au FIFF à Berne
A peine le rideau baissé à Fribourg, les festivités reprendront quelques jours plus tard à Berne. Du 23 au 29 mars, les cinémas Quinnie et trigon-film rendent hommage au FIFF en présentant au Kino Movie chaque jour un film sélectionné lors de ces vingt dernières éditions. Au totale, huit perles parmi lesquels: «No te mueras sin decirme adónde vas» («Ne meurs pas sans me dire ou tu vas»), «Yi yi», ou encore «Dao ma tse» («Le voleur de chevaux»).
Restauration
Comme chaque année, le public pourra rencontrer les invités et goûter aux spécialités de la cuisine des continents du Sud, sous la tente du Festival, derrière les cinémas Rex.